La ronde : novembre 2016

La ronde est un échange périodique bimestriel de blog à blog sous forme de boucle. Le premier écrit chez le deuxième, qui écrit chez le troisième, et ainsi de suite. Pour chaque échange, un thème, un simple mot : aujourd’hui « Ouvrage(s) ».

Je suis heureux d’accueillir Franck Bladou

Contemplation assis dans le thym

Il était cinq heures du soir. De passage, je n’avais qu’une heure à lui consacrer. Les lacets s’enchainaient dans une envolée tortueuse d’Est en Ouest. C’était un jeudi d’avril. Un grand ciel bleu auréolait encore les pins parasols rescapés qui gardaient au fond de leur écorce l’écho des vibrations élytréennes des cigales de l’été passé. Après la mer de vignes sages, en vagues orthodontées, préambule clapotant d’une houle plus forte, culminait le plateau du Cengle, occupant l’horizon. Je la sentais sans la voir encore et chaque virage en épingle à cheveux la rendait plus désirable, déroulait la longue tresse qui menait à elle. J’allais, comme lui jadis, au motif. Seul, impatient, converti. J’allais la voir chatoyer sous la lumière progressivement déclinante, traquer l’imperceptible respiration de chacune de ses anfractuosités. Elle était là, bien sûr, mais chaque visite semblait la première, jamais la surprise ne s’était émoussée quand, aux détours d’un virage, elle apparaissait, massive, si proche mais inaccessible. Cette fin d’après-midi là, après une courte marche sur ses flancs instables, je me suis posté face à elle, seul, rocher parmi ses éboulis. Au pied du tsunami figé, j’ai savouré la menace éternelle d’un ensevelissement imminent. Une heure de dialogue discret, sans personne, à scruter les variations de son derme en reflet de celles du ciel. J’ai vu son profil de Moby Dick, le manteau de chromatophores qui recouvre son dos changer de couleurs et de texture comme un poulpe contrarié. Dans le silence strié de douces rafales de vent, j’ai écouté sa sagesse triasique, j’ai senti les reptiles sauriens endormis se tourner lentement dans leurs draps de calcaire, j’ai cherché du regard celui du peintre qui ne l’approchait jamais de si près. Un changement de couleur, peut être un signal, un frisson le long de son échine m’ont fait me lever et reprendre ma route. Il était alors six heures du soir.

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Pour ma part je suis très honoré d’être accueilli chez Elise Lamiscarre qui publie « L’oiseau ». Voici comment, ce mois-ci, va la ronde :

Elise Lamiscarre
chez Céline Gouel
chez jfrisch
chez Guy Deflaux
chez Hélène Verdier
chez Jean-Pierre Boureux
chez Dominique Hasselmann
chez Dominique Autrou
chez Franck Bladou
chez Noël Bernard-Talipo

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