le doux-amer

de la dame au front gris
nous n’avons perdu l’âme
après ces ans mûris
au son lent de la rame

nous béons dans le soir
en nos vieux fracs de jute
riant d’un écho noir
au plus fort de la chute

notre feu s’est perdu
et notre lis se fane
mais là dans le bas du
tronc notre danse flâne


Ce poème met en application la contrainte de l’hétérointervallisme proposée sur la liste Oulipo par Gilles Esposito-Farèse, qui la définit ainsi : « Sont interdits les mots qui présentent le même écart alphabétique entre deux paires de leurs lettres. Par exemple, « abc » serait interdit puisque |a-b| = |b-c| = 1, de même qu’« acte » parce que |a-c| = |c-e| = 2, ou « absent » parce que |a-b| = |s-t| = 1 (et simultanément |a-s| = |b-t| = 18). En revanche, un mot comme « absolu » serait autorisé, car les 15 intervalles possibles entre deux de ses six lettres sont tous différents (à savoir 1, 2, 3, 4, 6, 7, 9, 10, 11, 13, 14, 17, 18, 19 et 20, si ça vous amuse de le vérifier). » C’est l’exemple d’une contrainte indécelable à l’œil ou à l’oreille du lecteur, mais dont la forte rigueur pour l’écrivain provoque l’apparition de textes d’une poésie imprédictible.
Posté sur la liste Oulipo le 6 mai 2019.

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