La valise croisée

Il se penche et recherche vers son pied la valise.
Ne peut la voir, celle où pèse de rare écu.
Croit-il, tête abaissée là, trouver sirop, poule, pantoufle, vair ?
Rien que reste acide qui la poisse, sans fidèle or.

Mais le grave mort tremble, nuit, quand les sens durent.
En crédule, tombe à jamais qui coule, fils en trop.
Pleurant, trouve pourtant solitaire foulée grise, doucement traîne, trame peu,
Avoue être sans espoir, ni sans cette lueur du juste.
Sa fin ? – Voir le même être, trouble comme pas un,
Limite saoul. Tout console vue, noire liqueur lance vif matin.

Il ne croit rien mais en pleurant avoue sa limite.
Se peut-il que le crédule trouve être fin saoul ?
Penche la tête, reste grave, tombe pourtant sans voir tout,
Et voir abaissée acide mort à solitaire espoir le console.
Recherche celle-là qui tremble, jamais foulée ni même vue :
Vers où trouver la nuit qui grise sans être noire ?

Son pèse-sirop poisse quand coule doucement cette trouble liqueur.
Pied-de-poule, sans les fils, traîne lueur comme lance.
La rare pantoufle fidèle : sens-en trame, du pas vif.
Valise, écu, vair, or, durent trop peu. Juste un matin.


Nouvelle contribution à l’Oulipien de l’année, opération organisée chaque année par le site Zazie mode d’emploi en l’honneur d’un Oulipien, et consacrée cette fois à Raymond Queneau, dont l’un des 100 000 000 000 000 poèmes est proposé à toutes les réécritures. J’essaie une contrainte introduite récemment sur la liste Oulipo par Maxime David, les phrases croisées. Il s’agit de remplir une grille carrée ( ici 10×10 ) de mots dont l’ensemble des lignes constitue la première moitié du texte, et l’ensemble des colonnes la seconde moitié. Ce tableau est reproduit ci-dessous. J’ai choisi de tirer la première ligne et la dernière colonne respectivement du premier et du dernier vers du sonnet de Queneau.
Posté sur la liste Oulipo 7 septembre 2020.

phrases-croisees

 

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