graines à la volée

Vers cette mire anglaise où sont fuyards drainés,
De la jungle française aux sinistres cabines,
L’ouvrier tend rageur ses yeux déracinés.
Loin bonheur familial. Loin fêtes smaragdines.
Le temps est suspendu, les rêves sont freinés,
D’un curé brillent seuls cierges et paraffines.
L’hiver grippe l’élan des plans imaginés.
Rôde un pouvoir public aux haineuses machines :
Délire botanique ou loi chafii, nés
Hommes, faits plantes, fauchés, fondrez en tajines.
Votre acclimatation par d’atrophiants kinés,
Crime zoologique, étend brumes malines,
Déversant boue et pierre en ces terrains minés
Où l’on voit cultiver vertèbres et canines.
Là par un dieu salaud vous vous trouvez foinés.
Ferez-vous un éden de l’entrelacs d’épines,
Aux délices goûtant d’un joueur de qin, ès
Qualités de clerc d’Hespérides vipérines ?
Point d’Epicure au rang des hères houssinés,
Aucune académie, ni stances, ni comptines.
A côté de la mer rôdent des corps ruinés,
Visages d’adonis labourés de ravines.
« S’ils étaient Japonais ! Mais au Malawi nés
Ils salissent la France, y sèment leurs toxines,
Leurs enfants sales. Toi, le beur : fedayin es-
Tu ? Le mal secret qu’abhorrent nos webzines ?  »

Les émigrants - terre cuite d'Honoré Daumier - par autorisation du site raf.dessins@free.fr

Les émigrants – terre cuite d’Honoré Daumier – par autorisation du site raf.dessins@free.fr


Ce texte est une participation à « La ronde », un échange périodique bimestriel de blog à blog sous forme de boucle. Le thème pour l’échange du 15 juin était « Jardin(s) ». Mon pari était de traiter le thème sans jamais utiliser ce mot. J’ai recueilli, sans en changer l’ordre, l’ensemble des expressions contenant le mot « jardin » dans le dictionnaire du CNRTL ce qui a donné une liste de mots : anglaise, française, ouvrier, familial, suspendu, curé, hiver, public, botanique, plantes, acclimatation, zoologique, pierre, cultiver, dieu, Eden, délices, Hespérides, Epicure, académie, côté, Adonis, japonais, France, enfants, secret. Chacun de ces mots figure dans l’un des vers de ce texte. Leur nombre, 26, m’a suggéré d’utiliser comme contrainte les alpharimes : toutes les lettres de l’alphabet tour à tour suivies du même motif : aines, bines, cines … zines.
Ce texte a été publié sur le blog « Un promeneur » tandis que j’accueille Elise Lamiscarre.
Posté sur la liste Oulipo le 16 juin 2016.

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