Le sens de l’absence

Ton œil et le soleil règnent sur l’horizon
Et l’on fond envoûté de leur couleur céleste.
Triste Pierrot de lune, en l’obscure prison
D’un squelette figé, mine grise, je reste.

Ta bouche, goutte à goutte, en son gouffre entrouvert,
Cèle un flot de saveurs. O douceur caressante.
Sec à force mon cœur de se mettre à couvert,
Egrène abruptement sa fadeur marcescente.

Ta narine frémit aux senteurs du printemps
Et ce nez délicat tu dresses dans la brise.
Sang à peine battant, je m’abats, haletant.
La tempête m’étrangle et gèle ma banquise.

Ton oreille, attentive à l’océan sonore,
Parée de longs pendants, berce comme la mer.
Jamais onde n’atteint mon épais crâne aflore
Et la dendrite est rase en mon désert amer.

Ta main court sur mon front, y glissant un sillon
Plus chaud qu’un harmattan, plus marin qu’un alcool.
Mon poing s’ankylosant, tirant mon portillon,
Frissonnant au mistral, roidit, nouant licol.


Le Prix International du Pantoun Francophone « Pantun Sayang »  sera inauguré et décerné pour la première fois lors de la Rencontre de Barbezieux, (9 et 10 juillet 2015), le premier grand événement littéraire francophone consacré au pantoun malais. On peut participer à ce prix en envoyant un texte avant le 1er juin.
Le texte ci-dessus, composé de cinq pantouns, est ma participation à ce prix. Y sont évoqués successivement les cinq sens, vue, goût, odorat, ouïe, toucher. Chacun de ces pantouns est un lipogramme : en est absente à tour de rôle l’une des cinq voyelles, a, i, o, u, e.
Posté sur la liste Oulipo le 24 mai 2015.

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